Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/65

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comme nous faisons, la société humaine déjà actuellement établie ; ne voyant personne qui vive hors d’elle : mais bien que tous les hommes sont désireux de compagnie et d’entretien ; il peut sembler que je fais une lourde faute, et que je pose une pierre d’achop­pement dès l’entrée de cette doctrine civile à ceux qui prendront la peine de la lire, quand je dis que l’homme n’est pas né avec une disposition naturelle à la société. Il faut donc que je m’explique plus nettement. Il est vrai que selon la nature ce serait une chose fâcheuse à l’homme, en tant qu’homme, c’est-à-dire, dès qu’il est né, de vivre dans une perpétuelle solitude. Car, et les enfants pour vivre, et les plus avancés en âge pour mieux vivre ont besoin de l’assistance des autres hommes. De sorte que je ne nie pas que la nature ne nous contraigne à désirer la compagnie de nos semblables. Mais les sociétés civiles ne sont pas de simples assemblées, où il n’y ait qu’un concours de plusieurs animaux de même espèce : elles sont outre cela des alliances et des ligues soutenues par des arti­cles qu’on a dressées et cimentées par une fidélité qu’on s’est promise. La force de ces pactes est ignorée des enfants et des idiots ; et leur utilité n’est pas connue de ceux qui n’ont point éprouvé les incommodités que le défaut de société entraîne. D’où vient que ni ceux-là ne peuvent point contracter de société, parce qu’ils ne savent ce que c’est ; ni ceux-ci ne se soucient point de la contracter,