Page:Hoche, Le faiseur d'hommes et sa formule, Librairie Félux Juven, 1906.djvu/107

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Le tracé de notre première étape passait par le bois de cèdres où nous avions découvert certaine ébauche de temple dont je vous ai parlé. Questionné sur l’origine de cette œuvre d’art inachevée, le chef nous dit que quelques-uns de ses frères s’étaient amusés à sculpter et à ciseler ces pierres, sans trop savoir s’ils obéissaient à un pur sentiment artistique ou à un instinct inné d’iconolâtrie (le mot n’est pas de lui, je m’en sers simplement pour résumer ses explications un peu confuses). Et là-dessus, la question religion effleurée par moi à dessein lui suggéra ces réflexions plus étonnantes encore.

— Nous n’avons pas de religion. Pourquoi en aurions-nous une ? La religion ne peut être qu’une conception individuelle plus ou moins transformée. Et nous ne sommes malheureusement pas des individus, nous ne sommes que les échantillons pareils d’une espèce. À telles enseignes, que le Père ne nous a même pas donné de noms distinctifs comme cela se fait chez vous. Il nous a désignés et nous nous désignons encore entre nous par des numéros. L’épithète « divin » que nous appliquons aux autres hommes de l’humanité, à ceux qui sont barbus comme notre Père et comme vous, n’a pas pour nous le sens que vous lui prêtez. Elle corres-