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945 CORTE-REAL — CORTÉS 946

dont Simonde de Sismondi a signalé l’élévation et l’énergie.

De tous les ouvrages de Corte-Real, le moins estimé, et, il faut le dire, le moins connu, est celui qu’il écrivit en espagnol au temps de la chute du Portugal. Dès 1576 le poëte l’avait dédié à Philippe ; et après son apparition non-seulement il n’alla pas en Espagne, mais il protesta par d’autres poëmes, restés inédits, contre toute idée de servilisme. Son Austriada est intitulée : Felicissima victoria concedida del cielo al señor D. Juan de Austria, en el golfo de Lepanto, de la poderosa armada othomana, en el ano de nuestra salvacion de 1572 ; Lisboa, Antonio Ribeiro, 1578, in-4o. De fausses indications bibliographiques nous avaient fait répéter à tort que ce poème en XV chants avait été réimprimé en 1577 pour la deuxième fois. Les œuvres de ce poëte éminent devraient être enfin réunies : on pourrait alors y joindre plusieurs ouvrages manuscrits dont, grâce à Barbosa Machado, il serait encore possible de trouver la trace ; le plus important est intitulé : Perdiçâo del rey D. Sebastido em Africa e das calamidades que se seguirdo a este reyno. A la mort de l’auteur, ce poëme avait plusieurs chants, et il n’est guère probable qu’on en ait perdu toutes les copies. — Nous citerons encore : Elegia a huma dama illustre natural de Evora, dont une portion a paru dans la première partie de la Monarchia portugueza de Brito. — Le dernier ouvrage inédit de Corte-Real avait été probablement écrit en prose ; c’est l’Epilogo de capitaens insignes portuquezes, une sorte de Plutarque portugais, qui aurait offert un vif intérêt, écrit par un homme de cette haute intelligence et que ses voyages avaient dû conduire sur le théâtre de tant de grandes actions. Ferdinand Denis.

Barbosa Machado, Bibliotheca lusitana, — Simonde de Sismondi, Histoire de la littérature du midi de l’Europe. — — Bouterweck, Geschichte, etc., — Ferdinand Denis, Chroniques chevaleresques de l’Espagne et du Portugal, t. II ; Résumé de l’histoire littéraire du Portugal et du Brésil, in-18. — Le comte A. Raczynskl, Dictionnaire historico-artistique du Portugal ; Paris, 1847, in-8o.

CORTÉS ou CORTEZ (Fernand), le plus grand des hardis aventuriers ou conquistadores qui, au seizième siècle, fondèrent la domination espagnole en Amérique, naquit à Medellin, en 1485, et mourut à Castilleja de la Cuesta, près de Séville, le 2 décembre 1547. Il était fils de Martin Cortés de Monroy, gentilhomme peu fortuné, mais fort honorable, et de doña Catalina Pizarro Altamirano. Cortés avait, dit-on, dans sa jeunesse une constitution faible, mais qui se fortifia avec l’âge. A quatorze ans, il fut envoyé à Salamanque par son père, qui le destinait à la profession de légiste. Le jeune homme ne répondit pas aux vues paternelles. Dans un séjour de deux ans au collège, il fit une petite provision de latin, apprit à écrire en bonne prose et même à tourner des vers « de quelque mérite, dit Argensola, si l’on considère


que Cortés en est l’auteur ; » puis, au grand chagrin de ses parents, il revint au logis, mener une vie oisive et turbulente. Se sentant un penchant tout particulier pour la carrière des armes, ou plutôt pour la vie aventureuse du soldat, il songea vers dix-sept ans à s’enrôler sous la bannière de Gonsalve de Cordoue ; il se décida ensuite à partir pour le Nouveau Monde avec Nicolas de Ovando, successeur de Colomb. Une chute qu’il fit en escaladant un mur, dans un rendez-vous d’amour, le retint au lit jusque après le départ de l’expédition d’Ovando, et le força d’attendre deux ans encore une nouvelle occasion. Enfin, en 1504, il s’embarqua sur une petite flotte marchande, et dit adieu au rivage natal, l’année même de la mort d’Isabelle la Catholique.

Arrivé à Hispaniola, après une traversée orageuse, il se rendit à l’instant chez le gouverneur, qu’il avait connu personnellement en Espagne. Ovando était absent pour une expédition dans l’intérieur ; son secrétaire reçut le jeune aventurier avec bienveillance, et lui assura qu’il obtiendrait sans peine une importante concession de terre. « Je viens pour trouver de l’or, répliqua Cortés, et non pour labourer la terre comme un paysan. » Il accepta cependant, en attendant mieux, une concession de terre avec un repartimiento d’Indien , et fut nommé notaire de la ville ou de l’établissement d’Acua. Malgré ces graves fonctions, il consacrait une grande partie de son temps à des intrigues amoureuses, à des duels, et à des expéditions contre les indigènes. Ce fut sous les ordres du lieutenant d’Ovando, Diego Velasquez, que Cortés, s’initiant à la sauvage tactique des guerriers indiens, se familiarisa avec la fatigue, avec le danger, et malheureusement aussi avec les actes de cruauté qui souillèrent trop souvent les exploits des Espagnols dans le Nouveau Monde. En 1511 , lorsque Velasquez entreprit la conquête de l’île de Cuba, Cortés le suivit ; sans montrer dès lors les grandes qualités qu’il devait déployer dans la suite, il se fit remarquer par son activité, son courage, ses manières cordiales et ouvertes, sa bonne humeur et ses vives saillies. Après la soumission de l’île, il paraît avoir joui d’une grande faveur auprès de Velasquez, qui venait d’en être nommé gouverneur. Selon Las Casas, ce dernier le choisit pour un de ses secrétaires. Une de ces affaires d’amour qui avaient déjà plus d’une fois compromis la position et la vie de Cortés vint le brouiller avec son protecteur.

Cortés avait fait à Catalina de Xuarez, jeune fille fort belle, mais de fortune médiocre et de noblesse au moins douteuse, une promesse de mariage qu’il ne se pressait point de tenir. Velasquez voulut l’y contraindre ; et Cortés, pour se dérober à ses instances, se lia avec les nombreux mécontents de Cuba, et offrit d’aller exposer leurs griefs contre le gouverneur aux autorités supérieures d’Hispaniola. Velasquez, averti du complot, fit saisir son ingrat secrétaire ; on assure