Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/120

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mademoiselle de Scudéry, faites-le entrer tout de suite ; cet homme qui vous semble terrible ne peut me causer à moi aucune inquiétude.

— Le président La Reynie, mademoiselle, dit Desgrais lorsqu’il fut introduit, m’envoie vous adresser une prière, à laquelle pourtant il n’espérerait guère vous voir souscrire, s’il ne connaissait pas votre vertu, votre courage, si de vous seule ne dépendait pas le dernier moyen d’éclaircir un criminel mystère, et si vous n’aviez point déjà pris part à cette affaire terrible qui tient la chambre ardente et nous tous en si grand émoi. — Olivier Brusson, depuis qu’il vous a vue, est devenu presque aliéné. Quelque décidé qu’il parût naguère â confesser ses crimes, il jure maintenant de plus belle, au nom du Christ et de tous les saints, qu’il est tout-à-fait innocent du meurtre de Cardillac, malgré sa résignation à subir la mort qu’il a, dit-il, méritée. Remarquez, mademoiselle, que cette dernière phrase indique clairement qu’il a commis d’autres scélératesses. Mais tout a été mis vainement en usage pour lui arracher un seul mot de plus ; la menace même de la torture n’a servi à rien. Il nous supplie, il nous conjure de lui procurer une entrevue avec vous : à vous seule il veut tout avouer. Daignez, par grâce, mademoiselle, consentir à recevoir les aveux de Brusson.

— Comment ! s’écria mademoiselle de Scudéry, avec indignation, dois-je servir d’agent au tribunal de sang, dois-je abuser de la confiance de ce malheureux pour l’envoyer à l’échafaud ! — Non, Desgrais ! Brusson fut-il même un infâme assassin, jamais