Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/18

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funeste de la puissance diabolique ! Oui, ce bonheur qui préside à votre jeu, baron ! les circonstances qui vous ont déterminé à jouer, vos procédés même et votre conduite au jeu, qui ne révèle que trop clairement quel intérêt de plus en plus vif il vous inspire, tout, tout me rappelle d’une manière frappante la destinée affreuse d’un infortuné qui, semblable à vous sous plus d’un rapport, débuta précisément de la même façon. Voilà pourquoi je ne pouvais détourner mes yeux à votre aspect, et je pus à peine m’empêcher de dire de vive voix ce que mon regard vous devait donner à deviner : — Oh ! ne vois-tu pas les démons étendre leurs griffes pour t’entraîner dans l’enfer ! — Voilà ce que j’aurais voulu vous faire entendre. — Mon désir était de lier connaissance avec vous et en cela du moins j’ai réussi. — Écoutez l’histoire de ce malheureux dont je parlais : peut-être alors serez-vous convaincu que ce n’est pas une chimère de mon imagination que le danger dont je vous vois menacé et dont je vous préviens. »

Tous deux, le baron et l’étranger, s’assirent sur un banc écarté, et celui-ci commença son récit en ces termes :


Les mêmes qualités brillantes qui vous distinguent, monsieur le baron, acquirent au chevalier de Ménars l’estime et l’admiration des hommes, et le rendirent le favori des femmes. Seulement, à l’égard de la richesse, la fortune l’avait moins bien