Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/216

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tous deux vécurent en Courlande. Il y avait lien de croire que la morne solitude de ce séjour leur répugnait, à eux plus gais et plus enclins à jouir de la vie que leur aïeul atrabilaire.

Le baron Roderich s’était chargé du logement et de l’entretien au château de deux sœurs de son père, deux vieilles demoiselles si médiocrement pourvues qu’elles vivaient presque dans l’indigence. Elles occupaient, avec une vieille domestique attachée à leur service, une des petites ailes du château. Le cuisinier avait au rez-de-chaussée un grand logement voisin de la cuisine, et, en outre, l’étage supérieur était encore habité par un vieux chasseur podagre et décrépit, qui faisait en même temps l’office de concierge. Le reste des gens de service demeurait au village avec l’intendant.

Seulement, vers la fin de l’automne, à l’approche des premiers frimas, à l’époque de la chasse aux loups et aux sangliers, le château voyait tout-à-coup s’animer son intérieur, et sa solitude se peupler. Alors, le baron Roderich venait de la Courlande avec sa femme, ses parents, ses amis, aceompagné d’une suite nombreuse et d’un grand train de chasse. La noblesse des environs, et même les amateurs de chasse de la ville voisine se rendaient aussi à R....sitten. À peine le bâtiment principal et ses dépendances pouvaient-ils contenir la foule des hôtes ; tous les poêles, toutes les cheminées étincelaient de feux bien alimentés, le tourne-broche gémissait du matin au soir, les escaliers retentissaient sans cesse des pas des allants et venants, tant maîtres que valets,