Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/32

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étoile. Après ma parfaite guérison, j’achetai près de Rome une petite maison de campagne où je me retirai avec ma femme. Hélas ! je n’ai joui que pendant un an d’une tranquillité, d’une béatitude telles que je n’en concevais même pas l’idée. Ma femme me donna une fille et mourut peu de semaines après. Je fus au désespoir. J’accusais le ciel, je me maudissais moi-même, je maudissais ma vie infâme, dont la puissance éternelle tirait vengeance en me ravissant ma femme, à qui je devais mon salut, le seul être en qui je trouvasse consolation et espérance ! Pareil au criminel qui craint l’horreur de la solitude, je me sentis poussé à quitter ma maison de campagne pour venir à Paris. Angela grandissait et embellissait, vivant portrait de sa mère, et je l’aimais à l’adoration. Pour elle je pris à cœur de me maintenir à la tête d’une riche fortune, et même d’en acquérir une plus considérable. Il est vrai, je prêtai de l’argent à haut intérêt, mais c’est une infâme calomnie que de m’accuser d’usure frauduleuse. Et qui sont mes accusateurs ? de jeunes fous qui me fatiguent de leurs instances, jusqu’à ce que je leur prête un argent qu’ils dissipent comme une chose sans valeur, et puis qui s’emportent et se récrient quand je poursuis rigoureusement la rentrée de mes avances. Mais cet argent ne m’appartient pas, il est à ma fille, et je me regarde seulement comme le gérant de son bien. Il n’y a pas longtemps que j’ai sauvé un jeune homme de la ruine et de l’infamie par le secours d’une somme considérable. Je ne regardai pas un seul instant la restitution comme probable,