Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/364

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important. — C’était, je me le rappelle positivement, dans la nuit du 8 au 9 septembre de l’année 17… Je rêvai donc, et mon illusion avait toute la force de la réalité, que le major ouvrait doucement ma porte, qu’il s’approchait de mon lit à pas lents, et qu’arrêtant sur moi ses yeux noirs avec une fixité effrayante, il me posait la main droite sur le front, de manière à me cacher les yeux, ce qui ne m’empêchait pourtant pas de le voir debout devant moi. Le saisissement et la peur m’arrachèrent un gémissement. Il dit alors d’une voix sourde : ‹ Misérable enfant de la terre, reconnais ton seigneur et maître ! À quoi bon te raidir et te débattre sous un joug dont tu cherches en vain à t’affranchir ? Ainsi que ton Dieu, je lis dans la profondeur la plus intime de ton être, et tout ce que tu as jamais tenu secret, tout ce que tu voudrais cacher en toi-même, m’apparaît clairement et à découvert. Mais pour que tu n’oses pas, ver de terre infime, douter de ma puissance absolue sur toi, je veux pénétrer, d’une manière qui soit visible pour toi-même, jusque dans le sanctuaire de tes pensées. › — Soudain je vis étinceler dans sa main un instrument pointu, et il le plongea au centre de mon cerveau !… En poussant un horrible cri de terreur, je me réveillai, baigné d’une sueur d’angoisse, et prêt à m’évanouir.

» Enfin je me remis ; mais un air étouffant et lourd m’oppressait, et il me sembla entendre à une grande distance la voix du major qui m’appelait coup sur coup par mon prénom. J’attribuais cela à l’émotion que m’avait laissée cet épouvantable rêve. Je sautai