Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/367

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coup : « La baronne3 a parfaitement raison ! dit-il. À quoi bon ces récits effrayants, à quoi bon ces histoires romanesques, précisément avant l’heure de se coucher ? Cela, du moins, est fort contraire à ma pauvre théorie du sommeil et des rêves, qui n’a, il est vrai, pour point d’appui que quelques millions d’expériences. — Si monsieur le baron n’a jamais eu que des rêves pénibles, c’est uniquement parce qu’il ignorait cette théorie, et que par conséquent il ne pouvait la pratiquer. Ottmar, qui argue d’influences magnétiques, d’action des planètes, et de je ne sais quoi encore, peut bien avoir raison jusqu’à un certain point ; mais ma théorie munit d’une cuirasse à l’épreuve de tous les rayons des astres nocturnes.

— En ce cas, je suis réellement bien curieux de connaître ton admirable théorie ! s’écria Ottmar. — Laisse parler notre ami Franz, dit le baron ; il saura bien nous convaincre à son gré de tout ce qu’il lui plaira. » — Le peintre s’assit vis-à-vis de Maria, et, après avoir pris une prise avec une contenance comique et un sourire doucereux et grimacier, il commença :

« Honorable assemblée ! Les rêves sont de l’écume : ceci est un vieux, très honnête et très expressif proverbe allemand. Mais Ottmar l’a si adroitement interprêté, et tellement subtilisé, que, tandis qu’il parlait, je sentais réellement surgir dans mon cerveau les petites bulles dégagées de la matière et venant s’unir avec le principe spirituel supérieur. Toutefois, n’est-ce pas dans notre esprit que s’opère la fermentation d’où jaillissent ces parties plus subtiles, qui