Le vieux baron s’égayait de plus en plus, et même, ce qui n’avait lieu que dans ses jours de plus grande satisfaction, il se fit apporter sa longue pipe turque garnie d’un bouquin d’ambre précieux. Enfin, quand la vapeur agréable et subtile du tabac turc commença à s’épandre dans le salon, et quand Maria fit égoutter dans le bol d’argent le jus de citron sur le sucre qu’elle avait elle-même cassé en morceaux, il sembla à tout le monde qu’un esprit familier et gracieux fût venu présider à ce bien-être, tel que toute idée de passé et d’avenir dut s’effacer et s’anéantir devant la suprême jouissance du moment présent.
« N’est-ce pas une chose bien remarquable, s’écria le baron, que la préparation du punch réussisse toujours si parfaitement à Maria ? Pour moi, je n’en pourrais vraiment plus goûter d’autre. C’est en vain d’ailleurs qu’elle transmet les instructions les plus minutieuses sur la proportion des parties intégrantes et sur tout le reste. Notre lunatique Katinka6, par exemple, avait fait un jour le punch devant moi, de point en point d’après la recette de Maria : eh bien, je n’ai pas pu avaler le premier verre. Il semble que Maria prononce, en outre, sur la liqueur, une formule magique qui lui transmet cette perfection merveilleuse. — En est-il autrement, s’écria Bickert, n’est-ce pas la magie de la grâce, le charme de l’élégance dont notre Maria sait animer tout ce qu’elle fait ; il suffit de l’avoir vue préparer le punch pour le trouver parfait et délicieux.
— Très galant ! répartit Ottmar, mais avec ta permission,