Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/418

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de peindre dans le style gothique tout le premier étage, dont il habitait lui-même une chambre : et du premier regard on devinait d’étranges allégories dans l’assemblage fantastique qu’il avait fait des objets hétérogènes dont les ornements gothiques motivent l’emploi. Une laide figure de diable guettant une jeune fille endormie se trouvait surtout reproduite très fréquemment.

Je courus dans la chambre de Bickert. Son fauteuil était encore à deux pas de la table sur laquelle on voyait un dessin commencé, comme si le peintre venait de quitter à l’instant son travail ; sur le dossier du fauteuil pendait sa redingote grise, et un petit bonnet gris était à côté du dessin. Il me semblait que j’allais voir entrer le vieillard avec ce visage affable et bon, où les souffrances mêmes de la mort n’avaient point laissé de traces, et prêt à accueillir dans son atelier le visiteur étranger avec une cordiale franchise.

J’exprimai au pasteur mon désir de demeurer plusieurs jours, plusieurs semaines peut-être, dans le château. Il parut surpris, et me dit qu’il était bien fâché de ne pouvoir souscrire à mon envie, attendu qu’on devait apposer les scellés judiciaires, en attendant l’arrivée du fondé de pouvoirs, et qu’aucun étranger ne pourrait même entrer dans le château. « Et moi ! si j’étais le fondé de pouvoirs lui-même, » lui dis-je en lui présentant une procuration fort explicite du propriétaire actuel, le baron de F***. Il ne fut pas médiocrement étonné, et il me combla de marques de politesse ; et pensant qu’il