Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/45

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sans exemple du chevalier indigna les joueurs les plus endurcis, ce fut une réprobation universelle, et la police supprima la banque du chevalier. On l’accusa, en outre, de supercheries frauduleuses ; son bonheur singulier ne donnait que trop de poids à cette accusation. Il ne put se disculper, et l’amende énorme qui lui fut infligée lui ravit une grande partie de sa richesse. Il se vit insulté, honni : — alors il revint dans les bras de sa femme, qui, malgré ses mauvais traitements, l’accueillit volontiers dans son repentir ; car le souvenir de son père, qui avait aussi abjuré les dérèglements du jeu, lui laissait entrevoir une lueur d’espérance, et l’âge mûr du chevalier était un motif de plus de croire sa conversion réelle et durable.

Le chevalier quitta Paris avec sa femme, et se rendit à Gènes, lieu de naissance d’Angela.

Là le chevalier vécut dans les premiers temps assez retiré ; mais il ne put jamais voir renaître ces douces relations de ménage que son mauvais démon avait détruites. Le calme fut de courte durée. Il sentit se réveiller son esprit d’inquiétude, et le besoin de chercher au-dehors des distractions étrangères. Sa mauvaise réputation l’avait suivi de Paris à Gènes, et malgré la tentation irrésistible qu’il éprouvait d’ouvrir une banque, il lui était absolument interdit d’en faire l’essai.

À cette époque, la plus riche banque de Gênes était tenue par un colonel français que des blessures graves avaient forcément dispensé du service. Le chevalier se présenta à cette banque pénétré d’un