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de Hoffmann.

chait à m’éviter ; mais je réussis tantôt à frôler sa robe, tantôt, tout à côté d’elle, à respirer une partie de son haleine, et je croyais voir renaître, parées de mille couleurs séduisantes, les heures fortunées de mon printemps.

Berger avait fait succéder le calme à la tempête, le ciel était rasséréné, de douces et vagues mélodies s’élevaient comme de petits nuages dorés au lever de l’aurore et se perdaient enfin dans un pianissimo presque imperceptible. L’artiste recueillit de nombreux et justes applaudissements, les rangs des assistants se confondirent, et il arriva ainsi que je me trouvai involontairement à deux pas de Julie, en face d’elle. Je me sentis animé de plus d’énergie : je songeais, dans le douloureux transport de mon amour insensé, à la retenir là, à la serrer entre mes bras !… quand la figure damnée d’un valet importun se glisse entre nous deux, un vaste plateau sur les mains, en chuchotant d’une voix déplaisante : « Vous plairait-il. .. ? »

Parmi les verres remplis de punch fumant, j’en remarquai un élégamment taillé à facettes, et plein de la même boisson, à ce qu’il paraissait. Comment ce verre particulier se trouvait là au milieu des autres, c’est ce que sait mieux que personne celui que j’apprends chaque jour à connaître davantage, celui qui est fort habile, ainsi que Clément dans Octavien 2, à décrire de son pied gauche d’agréables crochets en marchant, et qui aime prodigieusement les petits manteaux et les plumes rouges. – Ce verre, cette coupe merveilleusement taillée et toute étincelante, Julie