Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 4, trad. Egmont, 1836.djvu/266

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parfumer, parler français et manger des glaces : je voudrais que chacun vint me serrer la patte en m’appelant mon cher baron ! ou mon petit comte ! et me soustraire enfin complètement à la nature canine. Oui, j’envisage en ces moments-là l’état de chien avec horreur ; et plus mon imagination exaltée me rapproche de la qualité d’homme, plus ce prétendu développement organique cause dans tout mon être une perturbation funeste. — J’ai honte d’avoir sauté et gambadé dans la prairie, et de m’être gaîment roulé dans l’herbe par une chaude journée de printemps. Mon caractère devient de plus en plus sérieux et réfléchi. À la fin de cette lutte déplorable, je me sens homme, et propre à dominer la nature qui fait croître les arbres, pour qu’on en puisse faire des tables et des chaises, et fleurir les fleurs, pour qu’on les mette en bouquets à sa boutonnière. Mais tandis que je m’approprie ainsi les plus éminentes facultés de votre nature, mes sens et mon esprit sont frappés d’une stupidité qui m’allanguit et m’oppresse horriblement, jusqu’à me jeter dans un évanouissement complet.

MOI.

Ah ! — ah ! mon cher Berganza ! Je l’ai bien dit ; elles prétendaient douer d’une figure humaine ce Montiel, que leur compère Satan a réservé sans doute à quelqu’autre emploi ; mais leurs conjurations magiques échouèrent devant cette énergie ironique qui dispersa les animaux et les instruments du sortilége, comme fit Méphistophélès dans le bouge de