Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/101

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ni loges : pour en tenir lieu, l’on avait pratiqué dans le fond une galerie sur la devanture de laquelle se dessinaient les armes de la maison Colonna, indice que le comte de ce nom avait pris sous sa protection spéciale Musso et son théâtre. La scène était formée par une élévation en planches recouvertes de tapis et entourée de feuilles pendantes de papier peint, qui représentaient, suivant les exigences de la pièce, une forêt, une rue, ou un salon ; joignez à cela que les spectateurs étaient obligés de se contenter, pour siéges, de bancs de bois durs et incommodes, et vous concevrez sans peine les murmures d’improbation des premiers venus contre signor Musso, qui décorait du nom de théâtre une mauvaise échoppe.

Mais à peine les deux premiers acteurs eurent-ils paru sur la scène, et échangé quelques paroles, que le public devint attentif. Bientôt de l’attention naquit un vif assentiment, à l’assentiment succéda l’admiration, et puis enfin l’enthousiasme le plus extrême, qui se manifesta par des battements de mains unanimes et des cris de bravo mille fois répétés.

En effet, on ne pouvàit rien voir de plus parfait que ces scènes improvisées de Nicolo Musso, toutes remplies d’esprit, de verve et de talent, et dont la mordante ironie châtiait d’un fouet satirique les ridicules du jour. Chaque acteur jouait son rôle avec une originalité sans exemple ; mais le Pasquarello surtout enlevait les suffrages de tous les assistants, par son jeu mimique incomparable, par sa verve inépuisable, la causticité de ses saillies, et son talent