Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/272

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de ses humeurs et de ses emportements ; bref, le maestro6, qui était à l’œuvre pour le prochain carnaval, était l’homme le plus heureux du monde, parce que la signora était prête à chanter ses airs sans les dix mille corrections, auxquelles il aurait été contraint de se prêter antérieurement. Du reste, on avait de bonnes raisons, ajoutait son ami, pour tenir soigneusement caché le secret de la cure pratiquée sur Angela, sans quoi il ne se passerait plus de jours qu’on ne fit voler par les fenêtres quelques cantatrices.

Le conseiller fut vivement ému, il communda des chevaux et monta en voiture. « Halte ! s’écria-t-il tout à coup. — Comment ! murmura-t-il en lui-même, n’est-il pas démontré qu’aussitôt que je l’aborde, le malin esprit reprend son influence et sa domination sur Angela ? Après l’avoir déjà jetée par la fenêtre, que ferai-je maintenant en pareil cas ? quel parti me reste ! »

Il descendit de sa voiture, écrivit une lettre fort amicale à son épouse convalescente, la remerciant expressément des sentiments de tendresse qui la portaient à se glorifier, par-dessus tout, que la petite fille eût, ainsi que lui, une légère marque derrière l’oreille, et… il resta en Allemagne. La correspondance continua avec une grande activité. Les assurances d’amour, les sollicitations, les plaintes sur l’absence de l’objet aimé, sur les dèsirs déçus, mille espérances, etc., etc., volaient et s’entrecroisaient de Venise à H...., et de H.... à Venise. Enfin Angela vint en Allemagne, et se distingua, comme on sait,