Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/394

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et puis, comme il ne pouvait pas voyager à pied avec la lourde valise, il se procura un cheval. Enfin, après six jours d’absence, il reprit gaîment le chemin de sa maison.

Il atteignit rapidement la forêt et l’endroit de sa demeure. Mais il trouva la maison fermée et barricadée. Il appela à haute voix le valet, sa Giorgina : personne ne répondait. Les chiens seuls hurlaient dans l’intérieur. Andrès eut le pressentiment d’un grand malheur ; il frappa à la porte avec violence et cria de toutes ses forces : « Giorgina ! — Giorgina ! » Alors un léger bruit partit d’une lucarne, Giorgina regarda dehors et s’écria : « Ah, ciel ! Andrès, est-ce toi ? Dieu soit loué ! te voilà de retour. » Enfin, à l’entrée de la maison, qu’elle lui ouvrit, sa femme se précipita dans ses bras pâle comme la mort et en jetant des cris de désespoir. Lui, restait interdit, immobile ; pourtant voyant sa femme prête à tomber par terre de défaillance, il la saisit et la porta dans la chambre.

Mais il se sentit glacé d’horreur en y entrant. Le plancher, les parois étaient couverts de taches de sang, et son plus jeune fils étendu sur son petit lit, la poitrine déchirée et ouverte ! — « Où est Georg, Georg ? » s’écria brusquement Andrès dans un désespoir farouche ; mais au même instant il entendit l’enfant descendre l’escalier en trébuchant et répétant le nom de son père. Des verres brises, des bouteilles, des assiettes étaient épars çà et là. La grande et lourde table, qui d’ordinaire était appuyée à la muraille, avait été trainée dans le milieu de la