Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/419

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pour un enfant de douze ans au moins, si son aspect physique n’eût témoigné de son jeune âge. À ce même repas, le docteur Trabacchio déclara aussi que son désir d’avoir un fils étant enfin exaucé, il ne se remarierait plus. Mais sa richesse démesurée, et plus encore ses façons d’agir mystérieuses, ses cures inouies qui tenaient du prodige, et des maladies, réputées incurables, cédant à quelques gouttes d’un élixir préparé et administré par lui, quelquefois même à un simple attouchement, à un seul regard de sa part, donnèrent lieu à toutes sortes de bruits étranges qui s’accréditèrent dans Naples. On traitait partout le docteur Trabacchio d’alchimiste, de conjurateur d’esprits, et enfin, on l’accusait d’avoir fait un pacte avec le diable lui-même.

Cette dernière croyance fut le résultat d’une aventure étrange, arrivée à quelques gentilshommes de la ville. Ils revenaient, à une heure avancée de la nuit, d’un joyeux repas, et les fumées du vin leur ayant fait perdre leur véritable route, ils arrivèrent dans un carrefour solitaire et de sinistre aspect. Ils entendirent tout-à-coup, près d’eux, un singulier bruissement, et distinguèrent, non sans effroi, un grand coq d’un rouge ardent, avec un bois de cerf fourchu sur la tête, avançant les ailes déployées, et fixant sur eux des yeux humains étincelants. Ils se réfugièrent à l’écart ; le coq passa, et derrière lui venait une grande figure enveloppée dans un manteau rouge, éclatant et galonné d’or. Quand il eut disparu, l’un des gentilshommes dit tout bas à ses compagnons : « C’était le docteur aux miracles, Tra-