Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/430

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florissante, ruinée par le chagrin, par sa longue captivé, et par les atroces douleurs de la torture, au point qu’il ne marchait plus qu’en chancelant, et pouvait à peine encore aller à la chasse, Andrès voyait aussi Giorgina, dont la nature méridionale était dévorée de consomption, se flétrir et dépérir de jour en jour. Tous les secours devinrent impuissants, et elle mourut peu de mois après la délivrance de son mari. Andrès fut au comble du désespoir, et ce ne fut que l’amour de son fils, merveilleusement beau et intelligent, et le vivant portrait de la mère, qui lui apporta quelque consolation. Pour lui, il se rattacha à la vie, et s’efforça de rétablir ses forces délabrées ; et enfin, après deux ans environ de convalescence, il fut en état d’entreprendre, comme autrefois, mainte joyeuse chasse dans la forêt. — Le procès de Trabacchio était définitivement terminé, et il avait été, comme son père jadis à Naples, condamné au supplice du feu.

Un jour, Andrès revenait avec son fils de la forêt à la tombée de la nuit ; il n’était pas éloigné du château, lorsqu’il entendit un gémissement plaintif, qui semblait partir du fond d’un fossé, dans un champ voisin. Il s’approcha et aperçut, étendu dans le fossé, un homme couvert de haillons sales et misérables, qui semblait près de rendre l’âme et en proie à une souffrance aiguë. Andrès posa à terre son fusil et sa gibecière, et retira avec peine le malheureux du fossé ; mais, lorsqu’il l’eut envisagé de près, il reconnut en frissonnant Trabacchio lui-même. Il le lâcha soudain et recula saisi d’horreur ; mais Tra-