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Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/447

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de Hoffmann.

tendre notre homme annoncer à l’avance aux spectateurs sous quel masque le directeur allait reparaître, en parodiant sa voix empruntée, ses poses et ses gestes. Alors celui-ci était accueilli à son entrée en scène par des éclats de rire universels, qu’il ne manquait pas d’attribuer, avec une visible satisfaction, à la réussite et à l’effet de son déguisement, tandis que c’était une manière d’applaudir à la ressemblance frappante du portrait dont le vieux venait de tracer l’ébauche.

À la fin pourtant son stratagème dut être divulgué, et l’on peut se figurer l’exaspération du directeur qui s’élança comme un sanglier furieux sur le pauvre comédien, fort embarrassé de se soustraire à ses mauvais traitements, et auquel il fut interdit absolument de remettre les pieds au théâtre. Mais, en revanche, le public l’avait tellement pris de ce jour en affection, et embrassa si vivement sa cause, que le directeur, d’ailleurs confondu de ridicule, n’eut d’autre ressource que de fermer son théâtre et d’aller chercher fortune ailleurs.

Plusieurs bourgeois respectables, et à leur tête l’aubergiste dont j’ai parlé, se cotisèrent, et procurèrent au vieux comédien de quoi vivre convenablement, si bien qu’il put renoncer tout à fait à une profession qu’il tenait pour dégradée, et séjourner dans la ville même, tranquille et sans souci.

Mais l’âme d’un acteur est pleine de bizarreries et de contrastes inexplicables ! À peine un an fut-il écoulé, que le vieillard disparut subitement, sans que personne pût savoir où il avait porté ses pas. —