Page:Hoffmann - Contes fantastiques I.djvu/47

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lade, le père Bonifacio, familiarisé à distinguer les traits précis qu’imprime sur la face de l’homme la mort qui s’approche, reconnut qu’aucun symptôme ne s’en révélait jusqu’ici dans l’évanouissement de Salvator, et qu’il restait des chances de secours dont il allait user sur-le-champ, à condition seulement que le sieur docteur Splendiano Accoramboni, avec ses noms grecs et ses bouteilles infernales, ne passerait plus le seuil de la porte.

Le bon père se mit aussitôt en route, et nous allons voir l’effet de sa promesse et de ses bons secours.

Quand Salvator sortit de son état de syncope, il lui sembla qu’il était couché dans un bosquet odoriférant, car au-dessus de sa tête s’entrelaçaient des branches et des feuilles vertes, et il ne souffrait plus, sinon qu’il sentait son bras gauche engourdi et comme enchaîné. — « Où suis-je ? » demanda-t-il d’une voix faible. — Alors un jeune homme, de bonne mine, qui se tenait debout devant son lit et qu’il n’avait pas aperçu plus tôt, se jeta à genoux, prit sa main droite, la baisa, la mouilla de larmes chaudes, et s’écria coup sur coup : « Oh ! mon digne Monsieur, oh ! mon grand maître, tout va bien maintenant : vous êtes sauvé !… vous êtes sauvé ! »

— « Mais dites-moi, » reprit Salvator. Soudain le jeune homme l’interrompit, en le priant de ne pas se fatiguer à parler dans son état de faiblesse et s’offrant à lui raconter ce qui s’était passé. « Or, continua-t-il, mon cher grand maître, vous étiez bien malade quand vous veniez d’arriver de Naples ici, mais