sible ; et je suis, bon gré mal gré, obligé de le croire.
LE COUSIN. — Avant de nous éloigner des murs du théâtre, laisse-nous jeter encore un regard sur cette bonne grosse femme aux joues bouffies de santé, qui est assise avec un calme et un sang-froid stoïque sur cette chaise de joncs, les mains cachées sous son tablier blanc, et qui a déployé devant elle, sur des linges blancs, un si riche magasin de cuillers polies, de couteaux, de fourchettes, de tasses à thé, de cafetières, de tricots, de faïence, d’assiettes, de plats de porcelaine à la vieille mode, et que sais-je encore ! Si bien que sa pacotille achetée de bric et de broc dans les encans, comme il est probable, forme un véritable orbis pictus[1]. Elle écoute l’offre de la pratique, la figure tranquille, sans avoir l’air de s’inquiéter qu’on achète où qu’on n’achète pas ; elle tire seulement une main de dessous son tablier pour recevoir l’argent et laisse prendre à ses pratiques les objets qu’elles ont achetés. C’est une marchande calme et réfléchie qui veut mettre quelque chose de côté. Il y a un mois, tout son commerce consistait en à peu près une demi-douzaine de bas de coton fins, et autant de gobelets. Ses affaires ont augmenté à chaque marché ; cependant elle n’a jamais apporté une meilleure chaise, elle cache toujours comme auparavant ses mains sous son tablier, ce qui indique qu’elle possède une grande égalité d’esprit et ne se laisse pas entraîner par la fortune à devenir hautaine et orgueilleuse. Quelle idée baroque me vient tout à coup ! Je me figure un petit diablotin mauvais sujet, tel que celui de la gravure de Hogarth, sous la chaise de la bigotte, un petit diablotin qui se glisserait ici
- ↑ Peinture du monde entier, de l’univers.