LE COUSIN. — Remarque, cher cousin, que depuis que nous sommes à la fenêtre, c’est la seule querelle qui ait eu lieu sur le marché, et encore a-t-elle été apaisée par le peuple lui-même. Une dispute, fût-elle plus sérieuse et plus menaçante, serait également calmée par les gens du marché ? La dernière fois il y avait entre les boutiques de bouchers et de fruitiers un grand gaillard en guenilles, d’une mine insolente et sauvage, qui, tout à coup, se prit de querelle avec un garçon boucher qui passait devant lui : sans autre forme de procès il voulait tomber sur le garçon avec l’énorme trique qu’il portait dans ses bras comme un fusil, ce qui eut infailliblement étendu par terre le boucher, s’il n’avait eu l’adresse de s’esquiver et de se réfugier dans sa boutique. Une fois là, il s’arma de sa pesante hache de boucher et voulut s’élancer sur son adversaire ; tout donnait à croire que cette rixe se terminerait par un coup mortel, et que le tribunal criminel en verrait le dénouement. Mais les fruitières vigoureuses crurent de leur devoir d’étreindre si tendrement le garçon boucher qu’il ne put faire un mouvement. Il était debout, la hache levée, comme il est dit dans le discours du farouche Pyrrhus, ainsi qu’un barbare en peinture qui, indécis entre la force et la volonté, ne peut agir. Pendant ce temps d’autres femmes et des marchands de brosses, de tire-bottes, etc., avaient cerné le gaillard ; la police put s’approcher et s’emparer de cet homme qui ressemblait à un affreux bandit.
MOI. — Ainsi tu penses qu’il règne dans le peuple un sentiment de l’ordre qui ne peut être que profitable à tout le monde.
LE COUSIN. — En tout cas, mon cher cousin, les obser-