Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/334

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conjugal n’est doux qu’autant qu’il identifie les intérêts des deux êtres, réunis par le besoin d’un plaisir légitime d’où résulte le maintien de la société politique, & capable de lui former des citoyens. L’amitié n’a des charmes que lorsqu’elle associe plus particuliérement des êtres vertueux, c’est-à-dire, animés du desir sincère de conspirer à leur bonheur réciproque. Enfin, ce n’est qu’en montrant de la vertu que nous pouvons mériter la bienveillance, la confiance, l’estime de tous ceux avec qui nous avons des rapports ; en un mot nul homme ne peut être heureux tout seul.

En effet le bonheur de chaque individu de l’espèce humaine dépend des sentimens qu’il fait naître & qu’il nourrit dans les êtres parmi lesquels son destin l’a placé ; la grandeur peut bien les éblouir ; le pouvoir & la force peuvent bien leur arracher des hommages involontaires ; l’opulence peut séduire des ames basses & vénales ; mais l’humanité, la bienfaisance, la compassion, l’équité peuvent seuls obtenir sans effort les sentimens si doux de la tendresse, de l’attachement, de l’estime dont tout homme raisonnable sent la nécessité. être vertueux, c’est donc placer son intérêt dans ce qui s’accorde avec l’intérêt des autres ; c’est jouir des bienfaits & des plaisirs que l’on répand sur eux. Celui que son naturel, son éducation, ses réflexions, ses habitudes ont rendu susceptible de ces dispositions, & que ses circonstances mettent à portée de se satisfaire, devient un objet intéressant pour tous ceux qui l’approchent : il jouit à chaque instant ; il lit avec plaisir le contentement & la joie sur tous les visages ; sa femme, ses enfans, ses amis, ses serviteurs lui montrent un front ouvert & serein, lui représen-