dont résulte ce qu’il appelle l’ordre de l’univers[1].
D’où l’on voit que c’est faute de connoître les forces de la nature ou les propriétés de la matiere que l’on a multiplié les êtres sans nécessité, & qu’on a supposé l’univers sous l’empire d’une cause intelligente dont l’homme fut & sera toujours le modèle ; il ne fera que la rendre inconcevable lorsqu’il en voudra trop étendre les facultés ; il l’anéantira ou la rendra tout-à-fait impossible, quand dans cette intelligence il voudra supposer des qualités incompatibles, comme il y sera forcé pour se rendre raison des effets contradictoires & désordonnés que l’on voit dans le monde : en effet nous voyons des désordres dans ce monde dont le bel ordre oblige, nous dit-on, de reconnoître l’ouvrage d’une intelligence souveraine ; cependant ces désordres démentent & le plan, & le pouvoir, & la sagesse, & la bonté qu’on lui suppose, & l’ordre merveilleux dont on lui fait honneur.
On nous dira, sans doute, que la nature renfermant & produisant des êtres intelligens, ou doit être intelligente elle-même, ou doit être gouvernée par une cause intelligente. Nous répondrons que l’intelligence est une faculté propre à des êtres organisés, c’est-à-dire, constitués & combinés d’une maniere déterminée, d’où résultent de certaines façons d’agir que nous désignons sous des noms particuliers d’après les différens effets que ces êtres produisent. Le vin
- ↑ Anaxagore fut, dit-on le premier qui supposa l’univers créé & gouverné par une intelligence ou par un entendement. Aristote lui reprochoit d’employer cette intelligence à la production des choses comme un Dieu-Machine, c’est-à-dire lorsque toutes les bonnes raisons lui manquoient. Voyez le Dictionnaire de Bayle article Anaxagoras, Note E. On est, sans doute, fondé à faire le même reproche à tous ceux qui se servent du mot intelligence, pour trancher les difficultés.