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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/105

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le eſt venue des Sauvages ignorans qui furent nos premiers peres, ou, ſi l’on veut, des Législateurs adroits qui ſçurent mettre à profit les craintes, l’ignorance & la crédulité de nos devanciers pour les ſoumettre à leur joug.

Cependant il y eût des mortels qui ſe vanterent d’avoir vu la divinité : le premier qui oſa le dire aux hommes fut évidemment un menteur, dont l’objet fut de tirer parti de leur ſimplicité crédule, ou un enthouſiaſte, qui débita pour des vérités les rêveries de ſon imagination. Nos ancêtres nous ont tranſmis les divinités qu’ils avoient ainſi reçues de ceux qui les ont trompés eux-mêmes, & dont les fourberies modifiées depuis d’âges en âges ont peu-à-peu acquis la ſanction publique & la ſolidité que nous voyons. En conſéquence le nom de Dieu eſt un des premiers mots que l’on ait fait retentir dans nos oreilles ; on nous en a parlé ſans ceſſe ; on nous l’a fait balbutier avec reſpect & crainte, on nous a fait un devoir d’adreſſer nos vœux & de fléchir le genou devant un phantôme que ce nom repréſentoit, mais qu’il ne nous fut jamais permis d’examiner. A force de nous répéter ce mot vuide de ſens, à force de nous menacer de cette chimere, à force de nous raconter les antiques fables qu’on lui attribue, nous nous perſuadons que nous en avons des idées, nous confondons des habitudes machinales avec les inſtincts de notre nature, & nous croyons bonnement que tout homme apporte au monde l’idée de la Divinité.

C’est faute de nous rappeller les premieres circonſtances où notre imagination fut frappée du nom de Dieu & des récits merveilleux qui nous