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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/107

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qu’on nous a toujours aſſûré qu’elles étoient eſſentielles à notre bonheur ; nous croyons les avoir toujours eues, parce que nous les avions dès notre enfance ; nous les jugeons indubitables, parce que nous n’avions jamais eu l’intrépidité d’en douter. Si notre ſort nous eût fait naître ſur les côtes de l’Afrique, nous adorerions avec autant d’ignorance & de ſimplicité le ſerpent révéré par les Negres, que nous adorons le Dieu ſpirituel & métaphyſique que l’on adore en Europe. Nous ſerions auſſi indignés ſi quelqu’un nous diſputoit la divinité de ce reptile, que nous aurions appris à reſpecter au ſortir du ſein de nos meres, que nos Théologiens le ſont quand on diſpute à leur Dieu les attributs merveilleux dont ils l’ont orné. Cependant ſi l’on conteſtoit ſes titres & ſes qualités au Dieu-ſerpent des Negres, au moins ne pourroit-on pas lui conteſter ſon exiſtence, dont on ſeroit à portée de ſe convaincre par ſes yeux. Il n’en eſt pas de même du Dieu immatériel, incorporel, contradictoire, ou de l’homme diviniſé que nos penſeurs modernes ont ſi ſubtilement compoſé. A force de rêver, de raiſonner, de ſubtiliſer, ils ont rendu ſon exiſtence impoſſible pour quiconque oſera la méditer de ſang froid. On ne pourra jamais ſe figurer un être qui n’eſt compoſé que d’abſtractions & de qualités négatives, c’eſt-à-dire, qui n’a aucunes des qualités que l’eſprit humain eſt ſuſceptible de juger. Nos Théologiens ne ſçavent ce qu’ils adorent ; ils n’ont aucune idée réelle de l’être dont ils s’occupent ſans ceſſe ; cet être ſeroit depuis longtems anéanti, ſi ceux à qui on l’annonce avoient oſé l’examiner.

En effet dès le premier pas nous nous trouvons