Page:Homère - Iliade, trad. Leconte de Lisle.djvu/166

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

je perdrai toute gloire, mais je vivrai très-vieux, et la mort ne me saisira qu’après de très-longues années. Je conseille à tous les Akhaiens de retourner vers leurs demeures, car vous ne verrez jamais le dernier jour de la haute Ilios. Zeus qui tonne puissamment la protège de ses mains et a rempli son peuple d’une grande audace. Pour vous, allez porter ma réponse aux chefs des Akhaiens, car c’est là le partage des anciens ; et ils chercheront dans leur esprit un meilleur moyen de sauver les nefs et les tribus Akhaiennes, car ma colère rend inutile celui qu’ils avaient trouvé. Et Phoinix restera et couchera ici, afin de me suivre demain, sur mes nefs, dans notre patrie, s’il le désire, du moins, car je ne le contraindrai point.

Il parla ainsi, et tous restèrent muets, accablés de ce discours et de ce dur refus. Enfin, le vieux cavalier Phoinix parla ainsi, versant des larmes, tant il craignait pour les nefs des Akhaiens :

— Si déjà tu as résolu ton retour, illustre Akhilleus, et si tu refuses d’éloigner des nefs rapides la violence du feu destructeur, parce que la colère est tombée dans ton cœur, comment, cher fils, pourrai-je t’abandonner et rester seul ici ? Le vieux cavalier Pèleus m’ordonna de t’accompagner le jour où il t’envoya, loin de la Phthiè, vers Agamemnôn, tout jeune encore, ignorant la guerre lamentable et l’agora où les hommes deviennent illustres. Et il m’ordonna de t’accompagner afin que je pusse t’enseigner à parler et à agir. C’est pourquoi je ne veux point me séparer de toi, cher fils, même quand un Dieu me promettrait de m’épargner la vieillesse et me rendrait à ma jeunesse florissante, tel que j’étais quand je quittai pour la première fois la Hellas aux belles femmes, fuyant la colère de mon père Amyntôr Orménide. Et il s’était irrité contre moi à cause de sa concubine aux beaux cheveux qu’il aimait et pour laquelle il méprisait sa femme légitime, ma mère. Et