Page:Homère - Les dix premiers livres de l’Iliade trad. Salel 1545.djvu/215

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Et que Priam, mes Couſins, mes Parens,
Freres germains, & aultres Adherens,
Seront occis. Mais mon affection
Ne peult avoir tant de compaſſion
De Pere, Mere, & Freres, & Amys,
(Eſtans ainſi à villaine mort mis)
Que j’ay de toy. C’eſt ce qui plus m’aggrave.
Meſmes penfant que tu ſeras Eſclave
De quelque Grec, qui t’en amenera
En ſon pays, & te condamnera
D’ourdir la toille & filer ſans ſejour :
Puis au matin, & au plus hault du jour
Aller quérir de l’eau en la fontaine :
Qui te ſera inſupportable peine :
Mais le beſoing alors t’y contraindra.
Et de cecy bien ſouvent adviendra,
Que les Paſſans diront : Voila la Femme
Du Preux Hector : qui acquiſt Los & Fame
Entre les ſiens, quand les Grecs aſſiegerent
Troie la Grand, & puis la ſaccagerent
Quelle douleur pourras tu lors avoir,
Oyant ainſi mon Nom ramentevoir,
Et te voyant de moy deſtituée,
Pour en Servaige eſtre conſtituée ?
Certes tres grand. Mais avant que ceſte oeuvre
Puiſſe advenir, je veulx que Terre coeuvre
Ce triſte corps : & que la Mort me prive
D’ouyr les plainſtz de ma Femme captive.
    Diſant ces motz, le Prince de valeur
Diſſimulant ſa Triſteſſe & Douleur,
Tendit les mains, pour avoir en ſes Bras
Son petit Filz, Popin, Doillet, & Gras,