Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/240

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missant dans mon cœur. Et le vent et le flot poussèrent les Phoinikes jusqu'à Ithakè, où Laertès m'acheta de ses propres richesses. Et c'est ainsi que j'ai vu de mes yeux cette terre.

Et le divin Odysseus lui répondit :

— Eumaios, certes, tu as profondément ému mon cœur en me racontant toutes les douleurs que tu as déjà subies : mais Zeus a mêlé pour toi le bien au mal, puisque tu es entré, après avoir beaucoup souffert, dans la demeure d'un homme excellent qui t'a donné abondamment à boire et à manger, et chez qui ta vie est paisible ; mais moi, je ne suis arrivé ici qu'après avoir erré à travers de nombreuses villes des hommes !

Et ils se parlaient ainsi. Puis ils s'endormirent, mais peu de temps ; et, aussitôt, Éôs au beau thrône parut.

Pendant ce temps les compagnons de Tèlémakhos, ayant abordé, plièrent les voiles et abattirent le mât et conduisirent la nef dans le port, à force d'avirons. Puis, ils jetèrent les ancres et lièrent les câbles. Puis, étant sortis de la nef, ils préparèrent leur repas sur le rivage de la mer et mêlèrent le vin rouge. Et quand ils eurent assouvi la faim et la soif, le prudent Tèlémakhos leur dit :

— Conduisez la nef noire à la ville ; moi, j'irai vers mes champs et mes bergers. Ce soir, je m'en reviendrai après avoir vu les travaux des champs ; et demain, au matin, je vous offrirai, pour ce voyage, un bon repas de viandes et de vin doux.

Et, alors, le divin Théoklyménos lui dit :

— Et moi, cher enfant, où irai-je ? Quel est celui des hommes qui commandent dans l'âpre Ithakè dont je dois gagner la demeure ? Dois-je me rendre auprès de ta mère, dans ta propre maison ?

Et le prudent Tèlémakhos lui répondit :

— Je ne te dirais point de te rendre à une autre demeure