Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/106

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Des sanglots à la bouche et son âme au supplice,
Ses regards contemplaient les flots déconcertants.

L’immortelle Calypse interroge son hôte,
Après l’avoir assis sur un trône soyeux :
« Hermès caducifer, digne d’estime haute,
Qui t’amène chez moi ? tu vins peu dans ces lieux.
Narre ton but, mon cœur à t’appuyer m’engage,
Si c’est en mon pouvoir, si c’est possible enfin.
Mais suis-moi, je m’en vais t’offrir les mets d’usage. »
Et la dive, approchant une table en bois fin,
Sert le rouge nectar, dispose l’ambroisie.
L’Argicide coureur mangea, but à son gré.

Lorsqu’il sentit son être amplement restauré,
Il répondit ces mots à la Nymphe saisie :
« La visite d’un dieu t’intrigue, ô déité ?
C’est bien, et franchement les causes t’en sont dues.
Zeus contre mon désir ici m’a député,
Car qui saurait joyeux franchir tant d’étendues
D’eau salée ? il n’est point de ville tout auprès
Qui sacrifie aux dieux, d’hécatombes les flatte.
Mais nul des Immortels du tonnant autocrate
Ne peut enfreindre ou bien éluder les arrêts.
Zeus dit qu’en ta maison vit le plus pitoyable
Des guerriers qui, neuf ans, portèrent le trépas
Dans Ilion, et puis, à sa chute effroyable,
Revinrent ; mais, en route, ils froissèrent Pallas
Qui déchaîna contre eux une trombe subite.
Ses braves compagnons périrent tous alors ;
Pour lui, l’onde et le vent l’ont poussé sur ces bords,
Et Jupin veut de toi qu’il reparte au plus vite.