Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/131

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Unit l’or à l’argent, parfait une œuvre d’art,
De même elle embellit ses regards et son geste.
Près du rivage amer, lui, s’assied à l’écart,
Superbe, rayonnant ; la princesse l’admire,
Puis, haranguant encor sa suite aux longs cheveux :
« Oyez, blanches beautés, ce que je vais vous dire.
Ce n’est point à l’insu des Divins bienheureux
Que cet homme aborda chez les nobles Phéaces.
Tantôt je le croyais un vulgaire mortel,
Et voici qu’il ressemble aux Princes des espaces.
Pour mari plût aux dieux que j’eusse un homme tel,
Qu’il habitât cette île et voulût s’y complaire !
Mais allons ! offrez-lui le boire et le manger. »

Chaque suivante alors, prompte à le satisfaire,
Place viande et boisson aux pieds de l’étranger.
Privé depuis longtemps de toute nourriture,
Le héros engloutit les bons mets octroyés.
Bientôt Nausicaa prend une autre mesure ;
Elle rapporte au char ses tissus reployés,
Attelle les mulets, puis remontant, légère,
De son siège elle exhorte Ulysse, comme il suit :
« Mon hôte, lève-toi ; viens, tu seras conduit
À la ville, au palais de mon illustre père.
Tes yeux pourront y voir l’élite de sa cour.
Or retiens cet avis, car tu me parais sage :
Tant que nous passerons par les champs de labour,
Mes compagnes et toi, derrière l’équipage
Marchez rapidement ; j’ouvrirai le chemin.
Mais quand nous atteindrons la ville crénelée
Que divise en deux parts un immense bassin,
Où les nefs, en dépit d’une passe étranglée,