Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/161

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Vulcain n’est plus ici, mais à Lemnos, je crois,
Auprès des Sintiens à la langue barbare. »
À ces mots, de Vénus un chaud désir s’empare ;
Et les voilà couchés. Tout à coup, sous son poids,
Des mailles les étreint l’appareil invisible.
Ils ne peuvent l’ôter, faire aucun mouvement ;
La fuite leur paraît désormais impossible.
Or l’illustre boiteux rentra subitement,
N’ayant pas de Lemnos accompli le voyage.
Le Soleil, son argus, avait su l’avertir ;
Donc il reparaissait, tourmenté davantage.
Au seuil il se détint ; là son cœur de bondir,
Et sa voix d’ameuter l’ambrosine famille :
« Ô Jupiter, et vous, béats sempiternels,
Venez voir des tableaux plaisants, mais criminels.
Parce que je suis laid, Vénus, de Zeus la fille,
Me méprise et chérit ce Mars pernicieux
Qui preste et beau s’avance, alors que mon pied cloche.
Qu’à mes seuls géniteurs, ce tort, on le reproche ;
Ne pas me mettre au monde eût été beaucoup mieux.
Regardez comme ils sont endormis bouche à bouche,
En mon lit profané ! j’enrage à cet affront.
Malgré tout leur amour, je pense que ma couche
Leur déplaira bientôt ; tous les deux s’ennuieront
D’en jouir : car j’entends que ce réseau les tienne,
Jusqu’à ce que Jupin m’ait rendu les présents
Qu’à ma noce j’ai faits pour cette épouse chienne.
Elle est bien belle, mais ne dompte pas ses sens. »

Il dit ; au seuil d’airain tous les dieux s’assemblèrent.
On vit d’abord Neptune, ébranleur de rochers,
Hermès, trouveur subtil, Phœbus roi des archers.