Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/325

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Va tout dire à ton fils d’un élan spontané,
Afin que, des rivaux préparant la ruine,
Vous marchiez vers la ville illustre ; quant à moi,
Bientôt je vous joindrai, car j’ai besoin d’émoi. »

Le touchant, à ces mots, de sa baguette orine,
Minerve d’un manteau, d’un superbe chiton
Revêt son corps plus jeune et sa taille grandie.
Sa peau reparaît brune, et sa joue arrondie ;
Une barbe bleuâtre ombrage son menton.
Après ce changement, Pallas s’éloigne ; Ulysse
Rentre au chaume : son fils le contemple étonné.
Il détourne le front, craignant qu’un dieu surgisse,
Et lui darde à l’instant ce discours empenné :
« Étranger, tu n’es pas du tout reconnaissable ;
Oui, tes traits sont changés comme ton vêtement.
Tu dois être un des dieux du vaste firmament.
Sois bon, pour que l’on t’offre un sacrifice aimable,
De l’or bien façonné ; reçois-nous à merci. »

Le célèbre monarque incontinent réplique :
« Dieu ne suis ; pourquoi donc me croire un Olympique ?
Je suis ton père aimé, l’objet de ton souci,
La cause de tes maux, de tes longues alarmes. »
Et d’embrasser son fils, de verser mille pleurs,
Lui qui précédemment cachait si bien ses larmes.

Télémaque agité, mais résistant d’ailleurs,
Au forain de nouveau tient ce vibreux langage :
« Non, tu n’es pas mon père Ulysse ; un dieu madré
Me trompe, désirant m’accabler davantage.
Nul homme ne saurait opérer à son gré