Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/423

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Les coffres à tissus parfumés d’un sachet.
Puis d’étendre le bras, de prendre à la muraille
L’arc que tient prisonnier un étui lumineux.
S’asseyant tout en pleurs, elle met, entre-bâille
L’étui sur ses genoux, enfin sort l’arc fameux.
Sitôt que de sa peine elle peut se remettre,
À travers les couloirs, jusqu’aux jeunes Amants
Elle marche, tenant l’arc courbe et la pharètre
Féconde en mainte flèche aux fatals sifflements.
Ses femmes derrière elle apportent une caisse
Pleine de fers, d’airain, servant aux jeux du roi.

Arrivée aux intrus, la divine princesse
Reste au seuil du salon à la riche paroi,
En recouvrant ses traits de son voile superbe.
Deux servantes de choix veillent à ses côtés.
Soudain aux Prétendants elle dit, d’un beau verbe :
« Oyez, nobles seigneurs, qui vous précipitez
Pour boire sans mesure et manger la fortune
D’un souverain toujours absent ; vous n’avez pu
Colorer jusqu’ici l’invasion commune
Qu’en parlant d’autre hymen, mon premier nœud rompu.
Hé bien ! ô Poursuiveurs, voici la lutte ouverte.
J’apporte le grand arc d’Ulysse le parfait :
Celui qui le tendra du poing le plus alerte
Et saura traverser douze haches d’un trait,
Je le suis, délaissant pour lui ce cher asile
De mon printemps, ce lieu, le plus doux des endroits,
Dont je me souviendrai, même en rêve, je crois. »

Elle dit et commande au porcher très docile
D’apprêter pour les chefs l’arc et le fer brillant.