Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/430

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C’est en ville aujourd’hui le festival du dieu ;
Aussi qui tendrait l’arc ? Donc, plus d’effort extrême.
Laissons également les haches au milieu
Du champ clos : sous le toit du Laërtide Ulysse
Aucun de ces objets ne sera détourné.
Ores, que l’échanson apporte maint calice ;
À Phœbus l’on boira, cet arc abandonné.
Et que Mélanthius, qui soigne bouc et bique,
Amène, au point du jour, la fleur de son troupeau.
On cuira les fémurs pour l’archer olympique,
Et, l’arc repris, le tir finira bel et beau. »

Antinoüs se tait ; à ses vœux l’on défère.
Les hérauts font aux mains l’ondoiement édicté ;
Puis de jeunes garçons, empourprant tout cratère,
Passent les gobelets auxquels ils ont goûté.

La libation faite, et chaque soif éteinte,
L’humble Ulysse s’écrie insidieusement :
« Écoutez, poursuiveurs d’une reine très sainte,
Ce que mon simple esprit m’inspire en ce moment.
J’en adjure Eurymaque, et l’immortel Antine
Dont le sage conseil a tantôt prévalu :
Oui, laissez l’arc, songez à la fête divine.
Un dieu fera demain connaître son élu.
Mais confiez-moi donc cette arme, que j’éprouve
Mes forces devant vous, pour voir si dans mon corps
Ma vigueur d’autrefois maintenant se retrouve,
Ou si courses et maux ont brisé mes ressorts. »

Il dit ; et la fureur transporte l’assistance ;
Tous craignent que son bras ne tende l’arc poli.