Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/433

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Ni ceux des ports voisins, près de l’hippique Élide,
Ne peuvent arrêter mon élan, si je veux
Le remettre au vieillard, même pour son usage.
Mais remonte chez toi, va reprendre ton lin,
Tes rapides fuseaux, et de ton entourage
Surveille le travail. Au groupe masculin,
À moi, le soin de l’arc : en ces lieux je commande. »

Pénélope, sans voix, se retire aussitôt,
Méditant de son fils la sage réprimande.
Rendue avec sa suite aux étages du haut,
Elle y pleure à loisir son cher époux Ulysse,
Jusqu’à ce que Pallas l’endorme doucement.

Or, Eumée a pris l’arme et court dans l’édifice ;
Tous les galants vexés l’en blâment vertement.
Chacun de ces faquins dans sa rage s’écrie :
« Où donc portes-tu l’arc, vil gardien de pourceaux ?
Là-bas bientôt tes chiens, meute par toi nourrie,
Sans espoir de secours te mettront en morceaux,
Si Phœbus et l’Olympe à nos vœux sont faciles. »

Ils disent… le porcher lâche l’arc à l’instant,
Ahuri du fracas de tant de voix hostiles.
Mais, d’un autre côté, Télémaque, éclatant :
« Père, en avant ! ne cède à leur multiple audace ;
Sinon, à coups de pierre, aux champs je t’enverrai.
Quoique je sois plus jeune, en vigueur je te passe.
Ô ciel ! si je pouvais, de ma force assuré,
L’emporter aussi bien sur ces chefs malévoles !
Je les chasserais tous, honteux et pantelants,
De ce castel souillé par leurs affronts sanglants. »