Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/440

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Viande et pain sont souillés. La troupe commensale,
À voir l’être expirant, s’agite en désarroi.
On s’enfuit des fauteuils, on roule par la salle,
Interrogeant des yeux chaque riche paroi ;
Mais plus de boucliers, de lances pour leurs paumes !

Et les chefs d’entreprendre Ulysse avec courroux :
« Malheur à toi, forain, qui transperces les hommes !
C’en est fait de tes jeux, tu vas périr par nous.
Car tu viens de faucher la fleur la plus exquise
D’Ithaque ; aussi ton corps repaîtra les vautours. »

Chacun parlait ainsi, croyant que par méprise
Le meurtre avait eu lieu ; ces esprits à rebours
Ne sentaient pas sur eux planer l’heure fatale.

Les mirant de travers, le terrible matois :
« Chiens, vous ne pensiez point qu’à ma rive natale
Ilion me rendrait, vous qui pilliez mes toits,
À mes serves donniez lubriquement la chasse,
Et convoitiez de plus ma femme, moi vivant,
Sans redouter les dieux, souverains de l’espace,
Ni l’humaine vengeance à jamais vous suivant.
Aujourd’hui sur vous tous la Kère étend ses ailes. »

Il dit ; et dans leur sein court la pâle terreur ;
Tous cherchent comment fuir ses atteintes mortelles.
Eurymaque lui seul se campe en discoureur :
« S’il est vrai que tu sois l’errant monarque Ulysse,
À bon droit tu te plains des actes déloyaux
Consommés dans tes champs et dans cet édifice.
Mais voilà terrassé le fauteur de ces maux,