Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/451

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Ou bien demander grâce au tueur intrépide.
Il lui sembla meilleur, le cas bien médité,
D’embrasser les genoux d’Ulysse Laërtide.
Donc, entre le cratère et son trône argenté,
Au sol il déposa sa lyre magnifique ;
Puis, courant vers Ulysse et prenant ses genoux,
Il le sollicita de ce mode énergique :
« Roi, je baise tes pieds ; sois-moi facile et doux.
Tu gémirais plus tard d’avoir tourné ta lame
Contre un homme chantant les héros et les dieux.
Je fus mon maître unique ; un dieu mit dans mon âme
Divers accents ; je puis, comme un hôte des cieux,
Te célébrer ; parlant ne me coupe la tête.
Ton cher fils Télémaque ici peut l’attester :
Ce n’est ni par besoin ni par amour de fête
Qu’aux banquets des Rivaux je m’en allais chanter ;
Mais le nombre et la force y conduisaient l’aède. »

Il dit, et le divin Télémaque l’entend.
S’adressant aussitôt au bon père qu’il aide :
« Arrête, que ton fer n’égorge un innocent.
Sauvons aussi Médon, le héraut très honnête,
Qui pendant mon enfance eut toujours soin de moi,
S’il n’a déjà péri sous Eumée ou Philète,
Ou de ta propre main, quand tu semais l’effroi. »

L’estimable Médon a saisi l’heureux prêche,
Car il s’était blotti sous un siège, et, pour fuir
La mort, s’enveloppait d’une peau toute fraîche.
Il sort de son abri, se dépouille du cuir,
Et court à Télémaque, et, d’une voix célère,
En prenant ses genoux, crie à ce généreux :