Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/471

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Est saturé d’amour et de douce atonie,
À l’onde elle reprend la rose Érigénie,
Pour éclairer le monde. Ulysse aux lourds pavots
S’arrache brusquement et dit à son épouse :
« Ô femme, nous avons bien souffert tous les deux !
Toi, tu pleurais ici sur mon retour douteux,
Et moi, loin de mon sol, Zeus et sa cour jalouse
Me retenaient toujours, quand je me désolais.
Puisque nous retrouvons notre couche adorée,
Surveille les trésors restés dans le palais.
Quant à la brebiaille en festins dévorée,
J’en ravirai mainte autre, et les Grégeois d’ailleurs
Me donneront de quoi remplir mes bergeries.
Présentement je vais dans nos terres fleuries,
Pour revoir mon bon père, abréger ses douleurs.
Mais toi, bien que sensée, écoute un mot utile :
Dès le soleil paru, l’affaire des Amants,
Qu’hier j’exterminai, se saura dans la ville.
Monte avec ton cortège en tes départements ;
Assieds-toi, ne regarde et n’appelle personne. »

Lors d’une riche armure il court se harnacher,
Et, réveillant son fils, le pâtre et le porcher,
Leur enjoint de vêtir l’appareil de Bellone.
Dociles, tous les trois s’arment pour les hasards,
Ouvrent la porte et vont, précédés par Ulysse.
Déjà brillait le jour, mais Athéné propice
Les pousse, entourés d’ombre, en dehors des remparts.