Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/85

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Puis, son compte achevé du plus perçant regard,
Il s’étendra près d’eux, comme au bercail un pâtre.
Dès que vous le verrez tout à fait endormi,
Armez-vous de courage, et, d’un bras affermi,
Tenez-le, quoi qu’il fasse, à fuir opiniâtre.
Car, afin d’échapper, de suite il deviendra
Toute espèce de bête, eau vive, ardente flamme.
Vous, maintenez-le bien, serrez-le jusqu’à l’âme.
Mais quand lui-même enfin te questionnera,
En redevenant tel qu’il fut pendant sa sieste,
À la force renonce, et détache, homme preux,
L’ancien : demande-lui le dieu qui te moleste,
Et comment retourner sur les flots poissonneux. »

« Idothée, à ces mots, plongea dans l’eau profonde.
Pour moi, je rejoignis mes bateaux ensablés ;
Ma pensée, en marchant, partout jetait la sonde.
Aussitôt mon retour aux parages salés,
Le souper fut servi, puis vint la nuit divine,
Et chacun se coucha sur le rivage amer.
Lorsque reparut l’Aube à la face rosine,
Je me rendis au bord de l’imposante mer,
En suppliant beaucoup les dieux : trois camarades
Me suivaient, dont l’élan m’avait paru certain.

« Cependant la déesse ayant plongé soudain,
Rapporta quatre cuirs de phoques de ces rades
Écorchés vifs : c’était pour son père un appeau.
Elle creusa des lits aux sables maritimes,
Puis s’assit, attendant ; bientôt nous la joignîmes.
Sa main nous fit coucher chacun sous une peau.
L’affût était cruel ; l’odeur du palmipède