Page:Horace - Œuvres complètes - Satires, épîtres, art poétique, tome 2, 1832.djvu/215

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qui donne la royauté à qui fait bien et qui fut chantée probablement par les Curius et les Camilles ? L'un vous conseille d'amasser du bien honnêtement, si cela se peut ; sans quoi, par tous les moyens possibles, et le tout pour avoir une meilleure place aux drames larmoyants de Puppius. L’autre vous dit et vous rend capable d'opposer un front libre et indépendant aux caprices de la fortune : lequel de ces deux conseils est le meilleur ?

Que si le peuple romain vient à me demander pourquoi je ne partage pas ses opinions comme ses promenades publiques, pourquoi mes goûts ne sont pas les siens, je lui ferai la réponse du fin matois de renard au lion malade : « C'est que je suis épouvanté de voir force traces de ceux qui entrent chez toi, et de n'en voir aucune de ceux qui en sortent. — Tu es, peuple romain, le monstre à cent têtes. Eh bien, quel parti prendre ? quel guide suivre ? Ceux-ci briguent une part dans les fermes générales ; ceux-là amorcent les veuves intéressées en flattant leur goût pour les friandises : les uns tendent leurs filets au crédule vieillard pour le retrouver au besoin ; les autres grossissent leurs revenus à la faveur d'une usure clandestine. Passe encore que chacun ait des goûts et des inclinations différentes ; mais que le même homme en change de quart d'heure en quart d'heure ! « Non, il n'est pas de site au monde plus agréable que celui de Baïes ! » se dit le riche, et déjà le lac Lucrin et la mer voisine se ressentent de sa prédilection. Mais un nouveau caprice a changé son idée : « Allons vite, ouvriers !