Page:Horace - Œuvres complètes - Satires, épîtres, art poétique, tome 2, 1832.djvu/243

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et pulluleront chaque année.

L'homme de bien, le sage, se déclare prêt à obliger ceux qui le méritent, et cependant il sait distinguer l'argent des lupins. Je me montrerai digne d'un bienfaiteur tel que toi. Mais, si tu veux que je ne te quitte jamais, rends-moi ma santé, rends-moi la noire chevelure qui ombrageait mon front ; rends-moi mon doux parler, mon gracieux sourire, et les regrets que m'inspirait au milieu du vin la fuite de l'agaçante Cynare.

Un mulot effilé s'était un jour glissé, par une fente étroite, dans un muid de blé. Bien repu et la panse pleine, il tentait vainement d'en sortir : « Si tu veux t'échapper d'ici, lui crie de loin une belette, il te faut maigre repasser le trou par lequel tu t'es maigre introduit. » Si l'on m'adresse cet apologue, je suis prêt à tout rendre, on ne m'a jamais vu, rassasié de bonne chère, vanter le sommeil du peuple, et je ne change point mon oisive indépendance pour les trésors de l'Arabie. Tu m'as souvent loué de ma modération ; tu m'as entendu te donner les noms et de prince et de père, et je ne te les ai pas épargnés en ton absence : essaie si je pourrai sans regret te rendre tous tes dons. Télémaque, le fils du patient Ulysse, disait avec raison : « Non, Ithaque n'est point faite pour des coursiers ; elle n'offre ni vastes plaines ni gras pâturages : je laisserai donc entre tes mains, Atride, des présents qui te conviennent mieux. » Aux petits il faut peu, et la pompe royale de Rome a moins de charme à mes yeux que la solitude de Tibur ou les délices de Tarente.

Un citoyen actif et ferme, un orateur illustré par ses triomphes au barreau, Philippe, revenait un jour de ses travaux vers huit heures, et se plaignait que l'âge lui allongeât le chemin du Forum aux Carènes, quand il aperçut, dit-on, dans