Page:Horace - Œuvres complètes - Satires, épîtres, art poétique, tome 2, 1832.djvu/291

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négligera ses devoirs pour le plaisir, se ruinera par les emprunts, et nous finirons par le voir gladiateur, ou réduit, pour subsister, à conduire au marché l'âne d'un jardinier. »

Gardez-vous bien de sonder jamais les secrets d'un ami ; et, s'il vous les a confiés, que ni le vin ni la violence des tourments ne vous en arrachent jamais la révélation. Ne vantez point vos goûts, ne blâmez pas ceux des autres ; et, si votre ami parle d'aller à la chasse, ne songez pas à faire des vers. Voilà ce qui refroidit singulièrement l'amitié des deux jumeaux Zéthus et Amphion ; il fallut que la lyre se tût, et que le docile Amphion fît ce sacrifice à l'humeur un peu sauvage de son frère. Faites comme lui: cédez de bonne grâce aux désirs d'un ami; et, quand il voudra mettre en campagne ses chiens, ses toiles, ses chevaux, levez-vous, fermez gaiement vos tablettes, et allez chercher de l'appétit pour un souper que vous aurez bien gagné. La chasse, d'ailleurs, est un exercice de tout temps en honneur chez les Romains : on y acquiert de la renommée, on y fait preuve de force et de santé, lorsqu'on est en état de le disputer, comme vous, de vitesse avec le lévrier, et de vigueur avec le sanglier. Manie-t-on les armes avec plus de grâce et d'adresse que vous ? et vos exercices au Champ-de-Mars, quelles flatteuses acclamations les accompagnent ! A peine sorti de l'enfance, vous avez bravé les périls de la guerre en marchant contre les Cantabres, sous les enseignes du héros qui vient d'arracher nos étendards des temples du Parthe, et dont les armes victorieuses achèvent en ce moment la conquête du monde.

Pour vous ôter enfin jusqu'au moindre prétexte de