Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 4.djvu/118

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Et que le ciel, versant ses clartés dans votre âme,

Eût réconcilié mon devoir et ma flamme ? [805]

Antigone

Avec tout son éclat la gloire du seigneur

Assiégeait dès longtemps mon esprit et mon coeur.

À ces impressions, je frémis de l'offense,

J'opposais ce poison sucé dès mon enfance.

Toujours prête à le croire, et voulant en douter, [810]

Reprenant le bandeau qu'il voulait écarter,

Je m'armais contre lui d'une honte rebelle,

Et de peur de changer, je vivais infidèle :

Mais pour déterminer mon esprit combattu,

Dieu s'est voulu servir de toute ta vertu. [815]

Par ta force aujourd'hui j'ai compris sa puissance,

Tes efforts ont enfin dompté ma résistance,

Et de ta mère encor le magnanime effroi,

En craignant ta faiblesse, a confirmé ma foi.

Misaël

Ô ciel ! Que vous charmez mon amour et mon zèle ! [820]

Et ce grand changement, ma mère le sait-elle ?

Antigone

Dans l'intérêt pressant d'empêcher ton trépas,

Je n'ai rien dit, j'ai craint qu'elle ne m'en crût pas,

Et qu'au moins dans le doute où je l'aurais laissée,

Mon entreprise encor ne s'en vît traversée. [825]

Mais toi, cher Misaël, tu me connais trop bien,

Pour penser qu'un moment je te déguise rien.

Je suis israélite, et tu peux bien m'en croire,

Puisqu'au trône des rois j'en préfère la gloire.

Antiochus m'offrant son sceptre avec sa main, [830]

N'a pu par ses bienfaits balancer mon dessein.

Je renonce à l'empire et je le sacrifie

À ma religion aussi bien qu'à ta vie.

Après ce que j'ai fait ; c'est à toi d'achever.

Misaël