Scène II
Croirai-je qu'à ce point Antigone m'offense
De mon empire offert est-ce la récompense ?
Et déjà la perfide, au mépris du devoir, [930]
Fait-elle ainsi l'essai du souverain pouvoir ?
Parce qu'elle m'a plu, me croit-elle en ses chaînes ?
De l'état en ses mains ai-je remis les rênes ?
Croit-elle désormais régner au lieu de moi ?
Et que pour être amant, j'ai cessé d'être roi ? [935]
Se fiant trop sans doute à l'orgueil de ses charmes,
Elle croit me fléchir par ses premières larmes ;
Mais en qui me trahit on sait trop qu'à mes yeux,
Jusques à la beauté, tout devient odieux.
Que j'humilierai bien cet orgueil qui la flatte ! [940]
On va me l'envoyer ; que me dira l'ingrate ?
Qu'à mon propre intérêt se laissant conseiller,
Elle m'épargne un sang dont je m'allais souiller ;
Et qu'elle a craint enfin que de notre hyménée
Cet auspice sanglant ne marquât la journée. [945]
Trop frivoles raisons ! Je veux être obéi.
Et servi malgré moi, je me compte trahi.
Mais que veut dire Arsace, et quel trouble l'étonne ?