Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/197

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Et demoiselle imagination,
Quoique n’en dise rien la fable ni l’histoire,
Avoient jadis même habitation.
Ils vivoient en commun, enfans de même pere.
Quelque tems de la paix on gouta les douceurs ;
Mais l’union ne dura guère ;
L’humeur broüilla bien-tôt le frere et les deux sœurs.
Imagination cédoit à ses saillies ;
Mémoire babilloit toûjours :
Las de caquet et de folies,
Jugement murmuroit : ainsi passoient leurs jours.
C’étoit sans cesse entr’eux quelque parole ;
Brouillerie au moindre incident :
À leur dire, l’une étoit fole,
L’autre une babillarde, et l’autre un vrai pedant.
Il faut nous séparer, mes sœurs ; que vous en semble,
Leur dit jugement leur aîné ?
Nous ne sçaurions durer ensemble ?
Pour vivre à part chacun de nous est né.
Imagination trouva le conseil sage ;
Pour trois têtes, dit-elle, est-ce assez d’un bonnet ?
Les trois fils de Saturne autorisent le fait,
Reprend mémoire en un long verbiage,