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Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/366

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LE ROSSIGNOL

Un rossignol, issu je crois, de Philomele
Né pour être l’honneur des bois
Saluant l’aurore nouvelle,
Réjouissoit les champs de sa naissante voix.
Arrive un lourd satyre, et moins homme que chevre ;
Il veut au rossignol donner quelques leçons,
Et posant sur sa flute une hideuse levre ;
Hola, l’ami, dit-il, repete un peu ces sons
Qu’est-ce ? Tu ne dis mot ! Allons ; que l’on s’essaie,
L’oiseau commence à peine ; il le gronde, il l’effraie ;
Rien qui vaille ; encor mal, plus mal, recomençons.
Mais l’oiseau rebuté du féroce satyre,
Se tait ne veut répondre à rien
La douce flute avoit beau dire ;
Le joueur gâtoit tout : rien ne paroissoit bien.
Il a beau changer d’airs, donner du guai, du triste ;
Essayer becare et bemol.
Dans son silence encor le rossignol persiste.
Que te sert d’être rossignol,
Dit enfin le fluteur ? Tu fais honte à ta race.
Il en jette sa flute ; et laisse là l’oiseau.