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LE MANOIR

je n’ai eu aucune intention de raconter un mensonge.

Pendant ce temps, Mme Hocquart avait repris son sang-froid et elle poursuivit :

— Qu’y a-t-il dans cette boîte au fond de votre cassette ?

— C’est une drogue précieuse, madame. Une dose de ce médicament, gros comme un pois, avalée tous les matins pendant une semaine, suffit pour dissiper toutes les vapeurs noires qu’engendrent la solitude, la tristesse, un espoir déçu.

— Qui a jamais entendu parler, dit-elle, que les affections de l’âme fussent susceptibles de céder à des remèdes administrés au corps ?

— Eh bien, madame, j’ai pu, dernièrement constater l’efficacité de cette drogue sur un gentilhomme des Trois-Rivières, le capitaine DuPlessis, réduit à un état de mélancolie qui faisait craindre pour sa santé.

— Et ce gentilhomme, demanda-t-elle d’une voix qu’elle s’efforçait de rendre ferme, est-il rétabli ?

— Du moins, madame, ses souffrances morales lui sont maintenant plus supportables.

— Je veux essayer ce remède, Louise, moi qui ai souvent des humeurs noires.

— Mais, ma chère maîtresse, qui vous assure qu’il n’est pas dangereux ?

— Moi, répondit le marchand, en avalant une partie de la drogue.

Mme Hocquart acheta la boîte et expérimenta de suite le médicament, assurant en riant que sa gaieté commençait déjà à venir. Puis elle s’éloigna, laissant à Louise le soin de payer le colporteur.

— Jeune fille, dit alors Taillefer, je lis sur ton visage que tu aimes ta maîtresse.

— Elle le mérite, monsieur. Mais où voulez-vous en venir ?

— Les moments sont précieux, écoute-moi