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MYSTÉRIEUX
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— C’est assez, Deschesnaux, c’est assez ! fit l’intendant, je saurai triompher de mes goûts pour la retraite ; car il s’agit de considérer le bien public ; et, pour servir mon roi et mon pays, vous avez raison, je dois continuer d’occuper le poste où je suis. Ordonnez que l’on selle nos chevaux ; je vais prendre, comme l’autre jour, un habit de livrée.

À ces mots, il alla rejoindre Mme Hocquart.

— Adieu, Joséphine, lui dit-il. Le soleil se montre à l’horizon ; je devrais être déjà à sept lieues d’ici.

— Sitôt me quitter ? dit-elle. Tu ne m’accorderas donc pas ma demande ? Soit ! je ne te réclame plus de me reconnaître publiquement pour ton épouse ; mais permets-moi au moins de confier le secret de notre union à mon père, et, en lui disant le nom de mon mari, de mettre fin à sa douleur. On rapporte qu’il est dangereusement malade.

— « On rapporte ? » répéta vivement M. Hocquart. Qui a pu te rapporter cela ? Deschesnaux ne lui a-t-il pas fait savoir tout ce dont on pouvait l’instruire pour le moment ? Ne t’a-t-il pas dit qu’on avait trouvé le noble vieillard bien portant ? Qui a pu faire naître d’autres idées dans ton esprit ?

— Personne, mon cher mari ; mais je voudrais m’assurer de mes propres yeux de la santé de mon bon vieux père ; il a été si tendre pour moi !

— C’est impossible, ma douce Joséphine. Notre secret cesserait bien vite d’en être un, car ton père a toujours chez lui ce capitaine des Trois-Rivières, ce DuPlessis, qui sait tout ce qui s’y passe et s’y dit.

— Mon père est un homme prudent ; et quant à DuPlessis, bien qu’il puisse m’en vouloir de l’avoir dédaigné, il est incapable de rendre le mal pour le mal.